[Terminé] Rencontre hasardeuse [Azul]

Naïa arrêta sa monture au beau milieu du sentier. Il devait se rendre à l'évidence, il était perdu. Voilà trois jours qu'il avait quitté la capitale pour Sinòdine, sans personne pour le guider. Mais alors qu'il pensait être sur la bonne voie, il commençait sérieusement à douter. Peut-être tournait-il en rond ? C'était fort probable. Il commençait à être trop épuisé et trop affamé pour avoir les idées claires. Il était possible que depuis un moment déjà, il se soit dévié du bon chemin. Il avait déjà croisé plusieurs pancartes de bois lors de carrefour, mais jamais encore le nom de la Cité Pourpre n'avait été indiqué. Pour cela, il devait en être bien loin. Karätõn, son cerf, ne pouvait l'aider, ne connaissant pas plus la région que lui.

Autour d'eux, il n'y avait rien qu'un monde plat et vert. De vastes plaines qui s'étendaient à perte de vue, parfois coupées par des collines lointaines. Le soleil d'été se montrait impitoyable en ce moment et Naïa, qui avait si peu l'habitude d'être ainsi frappé par le soleil, commençait sérieusement à avoir mal à la table à cause de lui. Un abri n'aurait pas été de refus, mais il n'y avait rien de semblable aux alentours. Il y avait déjà eu la chance il y a peu d'être tombé sur un petit ruisseau alors qu'il était assoiffé. Il n'avait plus osé le quitter pendant quelques minutes avant de se remettre en route.

Naïa talonna légèrement le cervidé qui reprit la marche sur le sentier de terre. Autant continuer à le suivre, il finira bien par débarquer quelque part. Il espérait ne pas mourir de faim avant cela dit. Au bout d'un moment, une silhouette dans le lointain se fit voir. Un petit village visiblement. Mais ce n'était certainement pas la ville qu'il cherchait. Mais peut-être qu'on pourra le renseigner là-bas. L'enfant pressa le pas de l'animal. Bientôt, ils se retrouvèrent cernés de champs où plusieurs personnes travaillaient la terre et où tous les légumes bien mûrs qui s'y trouvaient faisaient saliver le jeune garçon. Il avait horreur de voler, mais ce n'était pas comme s'il avait le choix. Car il ne disposait de rien sur lui pour s'offrir ne serait-ce que la moindre fraises bien rouge.

Mais il y avait encore trop de monde dans les champs en ce milieu d'après-midi et il ne serait pas prudent de tenter quoi que ce soit. Naïa poursuivit donc son trajet vers les premières maisons du village de Kanëzak. Car c'était bien là qu'il se trouvait, bien qu'il ne le savait pas, n'ayant que peu de notions de lecture. Autour de lui, la plupart des habitants scrutaient avec curiosité l'animal que le garçon chevauchait et les poussaient, pour la plupart, à deviner le fait que ce gamin était un étranger. La première chose que Naïa fit une fois au village fut de se trouver un coin d'ombre, ce qu'il trouva contre un mur où le soleil ne pouvait pas frapper. Après quoi, il mit pied à terre pour laisser un peu son compagnon de voyage se reposer de son poids.

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Les chaudes journées de Kanëzak donnaient souvent lieux à de sérieuses inquiétudes de ses habitants : la peur que la récolte ne se dessèche, la crainte de devoir travailler sous le soleil brulant, et la terreur que les ressources en eau ne s’épuisent trop vite, pour les habitants comme pour les bêtes de traits. En pleine saison d’été, avec un début de canicule, et un soleil au zénith, la panique et la fatigue se lisait clairement sur le visage de tous les agriculteurs.
Il y avait ceux qui se battaient pour défricher les mauvaises herbes desséchant la terre, et les autres qui luttait intérieurement contre la soif et la faim vertigineuse, exacerbé par ce qui leur restait et qu’il stockais en ce moment même à la Grange commune du village, qui se dressait vers l’entrée de la ville.
La Grange avec un grand G, était un bâtiment sans doute plus agréable que la plupart des maisons du canton, sans rentrer trop dans les détails, elle était spacieuse, robuste, lumineuse et rangé et entretenue.
C’est un endroit dans lequel Azul aimait bien se rendre quand il ne peut passer du temps dehors. Mais aujourd’hui, le destin voulait qu’il ne puisse pas s’y rendre. Et la chaleur dehors ne lui donnait pour une fois pas l’envie d’aller se percher sur un peuplier.
Donc ou pouvait bien être Azul me dirait-vous ? Et bien une fois n’était pas coutume, le garçon était parti avec d’autres tremper ses pieds dans la poussière dégoutante du sol et arracher les dangereuses mauvaises herbes drainantes du sol. Ca le fatiguais, mais l’énergie de la colère lui donnait sans qu’il s’en rende compte la force de poursuivre la tache là ou il pourrait en temps normal se focaliser sur un endroit ou trainer, comme la Grange par exemple…

Mais c’était la seule idée qui lui était venu avant que Vaël ne le traine gentiment jusqu’au bord du chemin et ne lui indique le sol. Après ça il avait focalisé son énergie dans l’amertume : « Si j’étais parti tout de suite… si cette paire de cerise ne m’avait pas attrapé si vite… » Ce genre de pensé l’occupait. Et elle l’occupait tant et si bien qu’il ne fit pas attention au catacloc catacloc venant de sa gauche et se reprochant de sa droite. A vrai dire même dans son état normal il ne fut pas sûr que Azul l’aurait remarqué, mais du moins il n’aurait pas tiré aussi fort sur cette tige bien trop enfoncé dans le sol qui le fit brutalement chuter par terre.

Ce furent les pattes poilues et malodorantes d’un truc qui ne pouvait qu’être un cerf qui « amortir » le choc. Ce ne fut pas sans douleur pour autant, pour Azul qui jura, et l’animal qui paniqua. Quelques personnes un peu curieuses, ou cherchant simplement une excuse pour faire une pause se tournèrent vers les deux jeunes accidentés.

-Mais depuis quand t’es là, dégage !?! Fit Azul avec mauvaise humeur, puis s’aperçu qu'un jeune homme se tenait juste derrière l'animal, probablement son éleveur ou son propriétaire. Bien sûr ce n'était pas de sa faute, ni de celle de l'animal, mais un enfant passe le plus clair de son temps à passer sa mauvaise humeur sur les autres... Et Azul n'échappe pas à cette règle. Et toi là, surveille un peu ta sale bête !

Rencontre Hasardeuse Naïa et Azul

Naïa avait préféré éviter les regards qui se posaient sur lui, se disant que plus il paraissait naturel, mieux sa venue passera. Il ne faisait que passer de toute façon. Tout ce qu'il voulait, c'était un peu de repos, pour lui comme pour sa monture et de préférence à l'ombre, à l'abri de ce soleil qui ne cessait de le tourmenter. Très bientôt, il ne sera plus qu'un souvenir, puis un oubli pour tous ceux qui l'auraient vu tant il ne voulait pas s'attarder en ces lieux. Il tentait pour la peine de rester discret mais ses désirs s'écroulèrent quand, tout à coup, une voix s'éleva non loin de lui, rouspétant après son cerf. L'animal, furibond, tapa du sabot contre le sol et aurait probablement été bien tenté de jeter une ruade sur ce gamin méprisant si Naïa ne s'était pas empressé de revenir près de lui pour lui flatter l'encolure et le calmer. Le jeune garçon posa ensuite son regard sur le responsable de tout ça -c'était son cerf mais Naïa songeait plutôt au responsable de la panique de son animal- C'est alors qu'il vit un autre jeune homme à terre, aux sabots du cervidé.

- Excuse-moi, fit le Vitenëulor un peu mal à l'aise, je n'avais pas vu que tu étais à proximité, sinon je me serais mis un peu plus loin. Karätõn n'a pas fait exprès, il a eu peur.

Naïa préférait esquivé l'autre qui n'avait pas l'air d'humeur très porteuse sur la conversation. Mais il s'était excusé, c'était la moindre des choses. Pour ce qui était d'être discret, c'était raté ! Quelques habitants avaient déviés leur regard sur la querelle, qui n'en était pas vraiment une finalement. Naïa récupéra donc les rênes de sa monture et éloigna le cerf de l'autre garçon, longeant la ruelle pour rester dans l'ombre protectrice des murs des maisons.

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La bête, eu l’air agacée, uniquement agacée. Du point de vue d’Azul du moins, car un des désavantages de se moquer de ce qui nous entoure, c’est qu’on ne remarque pas non plus que les potentiels dangers liés à nos actes. Dans le cas présent Azul se dis simplement que la bête avait bien de la chance que son maître soit intervenu en sa faveur.
Il dévisagea le « maître » d’ailleurs, de haut en bas. Un garçon de son âge, à peu près, dans des vêtements simples de couleur claire qu’ils n’a pas souvent l’occasion de voir. De pareil couleur masquerait en effet très mal les déchets du travail du bois et de la terre effectué par les kanëzakiens.
C’était en sommes peut ordinaire, Azul était convaincu qu’il n’était jamais venu par ici. Mais est ce qu’il devait l’interroger… ? Oh et puis crotte de laüd, il ne le connaissait pas, et ce type ne le recroiseras jamais, pourquoi perdre du temps avec cet inconnu qui lui feras probablement miroiter une meilleur vie que la sienne, lui qui était semi-aveugle…

Chaque fois qu’Azul Lenmeÿer avait ce genre de pensée, il avait une sorte de regard dégouté caractéristique. Il se détourna de l’inconnu et shoota dans la racine responsable de son actuelle mauvaise humeur.

- Tu ne pouvais pas savoir. Répondit-il simplement.

Autour d’eux, beaucoup de gens avaient de nouveau baissé le regard en voyant que c’était une broutille, mais le jeune myope ne le remarqua pas.

Sans plus réagir, il mit pourtant un certain temps avant de se repencher sur son désherbage, mais le regard de l’autre et de son Karätõn le mettait mal à l’aise… Il commença alors à réfléchir. Qui était ce garçon ? Comment avait t-il eu un cerf ? Pourquoi venait-il par ici ?Est ce que c’était un aventurier, un vagabond ? Évidemment en fait, sinon pourquoi serait il vétu aussi chichement ?

A moins qu'il ne soit un prince déguisé, comme dans les contes pour mômes que Azul écoutait avec son frère quand il était petit...

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Rencontre Hasardeuse Naïa et Azul

Le cerf coucha les oreilles en arrière, mécontent. Les humains de ce pays étaient vraiment des rustres. Il piaffa une fois avant de se laisser distraire par le geste de Naïa qui était venu calmer la situation. Naïa n'était d'ailleurs pas très à l'aise de la façon dont l'autre garçon l'observait mais il s'y attendait un peu en vérité. Il se savait assez voyant par rapport à la normalité des habitants de ce royaume. Déjà le cerf, ce n'était pas ce qu'il y avait de plus discret, sauf en forêt. Mais curieusement, ça lui était d'autant plus embarrassant que d'être scrutait ainsi par un autre enfant qui devait sûrement avoir le même âge que lui, ou pas loin en tout cas. Pourtant, les enfants étaient censés avoir moins de préjugés que les adultes. Mais dans le regard caché derrière ces bouts de verre, Naïa avait l'impression d'être dévisagé comme par n'importe qui.

Ce garçon n'avait pas l'air commode en plus. Naïa ignorait si c'était le coup du cerf ou autre chose, mais il était prêt à parier que l'autre enfant lui en voulait, ou était frustré, ou boudait. En tout cas, qu'il n'était pas content pour une raison qui n'appartenait qu'à lui. Il le prouva d'ailleurs en tournant le dos au Vitenëulor, donnant un coup de pied dans une plante desséchée au passage. Non, en effet, il ne pouvait pas savoir. Il ne pouvait pas savoir grand chose dans ce vaste pays. Pendant un moment, il se demanda si ces paroles étaient sincères où si l'autre ironisait avec mépris. Par chance, les autres personnes présentes dans les environs délaissèrent rapidement ce qui venait de se passer et ce n'était pas plus mal ainsi.

- Non, c'est vrai, fit Naïa, je ne pouvais pas savoir. Mais j'aurais dû faire attention quand même.

Il observa le garçon à lunette qui s'occupa à...Faire ce qu'il faisait probablement avant de se cogner contre le cervidé. Arracher les plantes ? Quelle idée ! Songeait Naïa. Les gens de ce royaume avaient de bien drôles de coutumes. Etrangement, l'inconnu n'alla pas plus loin dans son geste avec cette herbe. Le regard des deux enfants se croisèrent à nouveau et si l'un paraissait mal à l'aise, le second était devenu plus curieux.

- Peut-être pourrais-je t'aider pour me faire pardonner ? Que fais-tu ? Pourquoi tu veux...arracher ça de la terre ?

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Azul revint vite à lui, il ne devait pas penser à son frère chouchouté du destin. Lui il n’était rien pour personne, et pas non plus pour ce garçon et son ami … Karätõn. S’il agissait de façon assez instinctive pour un enfant en se montrant agressif, Azul n’en été pas pour autant un monstre. Mais il faisait selon ses envies, qui la plupart du temps se résumait en : « Je me montre pénible quand quelqu’un me dérange, comme ça il me fiche la paix. » Mais cette attitude était inconsciente, et s’appliquait surtout à ce qu’Azul considérait comme indigne d’intérêt. Dans le fond un cervidé lui était bien égal, mais ce gosse n’était pas commun… Et ça même si Azul ne le pensait pas directement, c’était un fait. Qui n’ôtait rien à sa mauvaise humeur, mais qui était là.

Voilà la raison qui le retint de l’envoyer mangé son cerf quand il lui proposa son aide. Ce gamin moins costaud que lui, lui proposait de l’aider à arracher la source de sa frustration, et puis quoi encore ?! Et il l’avait dit avec une telle franche curiosité qu’Azul se retourna et mis ses besicles pour être sûr qu’il ne se moquait pas de lui. Ça n’était pas le cas, et le début de l’inspiration agressive que prenait Azul pour répondre disparu en un rictus à mi-chemin entre le blasé et le condescendant.

- Ce sont des plantes extrêmement toxiques. On dois les retirer pour faire des potions et conquérir le monde.

Répondit-il avec le grand sérieux, même si intérieurement il ne faisait qu’anticiper une future remarque cinglante. Ca calmais de se moquer de quelqu’un. Surtout quelqu’un de faux-cul comme ce garçon qui proposait de l’aider sans pour autant en penser moins de lui que lui du garçon.

- Et je m’appelle Bïyokor au fait.

Rencontre Hasardeuse Naïa et Azul

Ce garçon antipathique semblait se moquer de lui...Naïa se demandait bien pourquoi il y avait cet once de mépris en lui. Il avait pourtant été parfaitement sincère quand il lui avait proposé son aide. Même s'il ne voyait pas l'intérêt d'arracher des plantes et même s'il n'avait pas de temps à perdre car la vie de sa mère était en jeu. En ce qui concernait la plante, malgré l'attitude un peu trop soudainement sérieuse de l'autre enfant, Naïa trouvait l'idée de "conquête du monde" trop grosse pour être vrai. Il pouvait en gober des histoires mais celle-ci, dans un tel environnement, était tout bonnement irréelle. Déjà parce que ce garçon n'avait clairement pas le type de quelqu'un prêt à une telle diablerie -quoi que...- ensuite ça prenait tout son sens de le dire au premier inconnu qui lui posait la question. En revanche, concernant la toxicité, ça restait toujours probable cela dit. Naïa connaissait assez bien les plantes, mais uniquement celles de son pays, celles qui poussaient majoritairement en forêt. Ces tiges là ne lui disaient rien. C'était sûrement des plantes plus adaptés aux zones de plaines. Mais cela ne changeait rien au fait que c'était bizarre d'arracher l'herbe. Il comprenait mieux pourquoi il n'y avait pas beaucoup de forêt dans ce royaume, si tout le monde arrachait tout ce qui dépassait un peu trop de la terre !

- Bon écoute, soupira Naïa plutôt peiné devant l'attitude de l'autre enfant, Bïyokor hm...Je comprends surtout que je dérange apparemment. Et ce n'était pas du tout mon attention.

Il ne lui avait même pas répondu s'il acceptait son aide ou pas en plus. Mais bon, au point où il en était désormais.

- Mon nom est Naïa, ajouta t-il après une nouvelle caresse au cerf tout en observant l'autre enfant, et je ne veux pas t'embêter plus longtemps dans ce cas. Je suis désolé...Sinon, est-ce que tu sais dans quelle direction se trouve la cité de Sinòdine par hasard ? C'est là-bas que je suis censé me rendre mais je me suis perdu et je me suis retrouvé ici. Je ne connais pas bien le...Le coin.

Il se passa une main derrière la nuque un peu mal à l'aise et pour ainsi dire, il doutait que ce dénommé Bïyokor soit assez aimable pour accéder à sa requête vu ce qu'il avait démontré jusque là mais bon, ça ne coûtait rien de demander. Surtout si ça pouvait lui faire gagner un temps précieux.

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Le garçon qui se présenta sous le nom de NaÏa lui répondit, d’un ton qu’Azul trouva agaçant, et non pas en raison de la peau de sa main se coupa entre le pouce et l’index en arrachant une énième racine, ou parce qu’il parce qu’Azul n’aimait pas les étrangers. Ni à cause de l’attitude qui lui faisait penser à son frère… Ce n’était cette petite seconde de réflexion le temps de déterminer si la conquête du monde été possible, puis l’air ennuyé de quelqu’un qui comprends qu’on se moque de lui et qui fait la moue… Ce qui l’énervé ce n’était pas ça, c’était son air peiné qu’il n’aimait pas. Cet air lui faisait penser à tous ces gens qui l’énervaient en permanence. Cet air de « vraiment tu es un pauvre petit garçon et j’aimerais t’aider à aller mieux ». Un air qui conviendrait bien à un prince maintenant qu’il y pensait. Ce garçon qui débarquait de nulle part pourrait après tout être quelqu’un d’important non ? Et ce malgré son âge. Peut-être qu’il était un apprenti laüd envoyé par l’autre Ar avec sa tête dépressive et son comportement de Gardien parfait pour le narguer et le punir. Sans doute il n’avait pas apprécié le comportement d’Azul. Oui ! Et c’était plus que probable ! C’était quasiment certain ! Azul porta un regard nouveau sur ce garçon. Quoique l’enfant et son animal pouvait sans doute difficilement percevoir une différence entre le dédain d’avant et le dédain d’après. Alors ce type était là pour se moquer de lui sans le faire vraiment, hun ? Les Gardiens étaient les pires hypocrites du monde !

Ca méritait qu’il monte d’un cran :

- Sans blague ? Tu es intelligent toi, tu veux une médaille pour ton intelligence ? Évidemment que tu me dérange ! Toi et ta grosse bête n’avait rien de mieux à faire que de coller un inconnu pour montrer leurs bonnes intentions ? Tu me fais penser aux Gardiens tiens !

Par grosse bête, il ne parlait pas de l’odorante bête poilu à corne, mais de celle avec des poils et un bec.

Il se massa la main en se retenant de grogner de douleurs, ce qui lui faisait émettre des onomatopées bizarres, et ajouta avec acidité :

- Et Bïyokor n’est pas mon prénom, ça veut dire poisson dans le stupide langage des laüds, et toi tu y crois ! Tu la mérite, ta médaille de l’intelligence, vraiment pas moins !

Et puis l’autre garçon se mettait en position de faiblesse, ça amusa beaucoup le garçon myope.

- Tu fais pitié. Dit-il avec un manque de respect caractéristique d’enfant en pleine crise. Après si tu veux de l’aide, demande à n’importe quel autre type de ce champ. Je ne sais pas où c’est. Cela était bien évidemment un mensonge, mais dit avec une telle acidité que ça en paraissait sincère.

Rencontre Hasardeuse Naïa et Azul

De pire en pire, l'autre garçon vint presque à lui crier dessus sans raison. Naïa le fixait, de plus en plus dépité par son agressivité, si ce n'est même choqué par tant de haine. Décidément, c'était visiblement tabou de demander de l'aide aux Hetenlaüdors. En plus, il en venait même à le comparer aux Gardiens, chose que Naïa comprit encore moins que tout le reste. Pourquoi les Gardiens ? Ce n'était pas censé être les gentils dans l'histoire ? Et pourtant ce garçon en parlait avec autant de mépris qu'il en avait pour l'étranger que représentait le Vitenëulor. Naïa regrettait amèrement d'avoir interroger cet enfant. Il n'était clairement pas le bienvenu avec lui et avait besoin de tout sauf de se faire crier dessus de la sorte.

- Quoi...? Mais...

Rien d'autre ne sortit de sa bouche. Que pouvait-il bien dire finalement ? Il se recula d'un pas du garçon haineux. Ou bien il était vraiment mal tombé aujourd'hui, ou bien cet individu avait vraiment un problème avec lui. Il jeta un oeil à Karätõn quand l'autre garçon parla de grosse bête. C'était peut-être aussi le coup du cerf qui lui posait problème. En fait, Naïa n'en savait rien du tout. Mais il savait une chose : ça ne servait à rien d'insister. Ce n'était pas la peine de s'attarder pour se faire presque insulter. Mieux valait qu'il s'en aille avant que les foudres de l'Hetenlaüdor ne deviennent plus violentes. Il parlait même de poisson. Mais comment Naïa aurait pu deviner pour ça ? Langage des Laüds ? C'était quoi ça encore ? Ooh que cette histoire devenait compliquée ! Bon, la situation devenait plus clair quand l'autre lui répondit qu'il ne savait pas où était Sinòdine de toute façon. Voilà qui facilitait les choses. Enfin, dans un sens du moins. Ca n'aidait pas Naïa mais ça lui donnait une bonne raison pour s'éloigner le plus loin possible de cet ignoble enfant. Il soupira, courbant l'échine tristement.

- Je euh...Bien. Au revoir...

Aussitôt, il s'empressa de tirer les rênes du cerf pour s'éloigner de l'individu colérique et quitta la petite rue, retournant sous le soleil de plomb qui régnait en cet été. Bon sang, il ne savait pas combien de temps il allait tenir comme ça, mais il devait pourtant tout tenter coûte que coûte.

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L’attitude pleutre, limite coupable de Naïa attisait davantage le mépris d’Azul. Le sentiment d’ascendant était tellement fort qu’il ne réfléchit même plus aux consèquence de ce qu’il pourrait faire. Pour lui ce sale gosse bien trop poli était en parti responsable de tout ce qu’il vivait, et toute son amertume se relâcha sur lui.

- Eh !

Quand le garçon recula, il lâcha ses besicles qui tombèrent dans la poussière et tendis les bras pour l’attraper par le col et lui dis d’un ton noué, comme si il se retenait de hurler :

- Tu es aussi bête que lâche. Ne remet plus jamais tes sales pieds ou ceux de ta bestiole ici, ou sinon…

Et tout en prononçant ces derniers mots, il le repoussa violement en arrière et l’observa jusqu’à ce qu’il disparaisse de la ville, un sourire méprisant et satisfait aux lèvres. Un toussotement à sa gauche attira son attention : un des hommes du champ le regardait d’un air mécontent et lui indiqua la mauvaise herbe toujours planté dans le sol. Azul déchanta, fronça les yeux dans une expression blasé et se remis au travail.

----- 1 semaine plus tard -----

Un fin bruit contre le toit réveilla Azul. Il ôta avec difficulté le bras sur son visage, et chercha à tâtons les besicles au pied de son lit tout en essayant d’identifier le bruit. Ça ressemblait à de l’eau cognant contre le toit, mais pas un orage, juste une fine pluie, toute légère… Si Azul l’avait entendu c’était même probablement parce qu’il dormait dans une mezzanine juste en dessous.

Il soupira, hésita à se recoucher, puis se disant qu’il n’arriverait pas à se rendormir à cause du bruit se leva, et passa sa jambe par-dessus la barrière en bois servant de sécurité pour quand lui et Ehr étaient enfant pour poser son pied sur un barreau de l’échelle et descendre jusqu’au salon. Ses parents étaient déjà réveillés, et le regard de son père brillait d’excitation.

- Il pleut… Le travail de nos fermiers va être plus simple ! On aura peut-être pas besoin de puisé dans les réserves, la canicule est peut-être fini !

- Mais toi tu vas bien prendre l’humidité quand tu va aller en forêt. Réprimanda sa femme, Jaÿna, la belle-mère d’Azul.

Azul s’installa à table et commença à manger une tartine de pain au beurre sans rien dire, alors que ses parents commençait à se chamailler comme deux joyeux enfants. Comme lui et son frère… Crottin de Laüd, si seulement le destin l’avais aimé, peut-être qu’il serait devenu Gardien, et aurait découragé son frère de le devenir ! Mais bon, le destin était injuste, comme toujours.

Une nouvelle remarque joyeusement bourrue de son père ramena Azul au travail qu’il avait fait au cours de la semaine. C’avait été douloureux, pénible, et maintenant sans inutile… Et personne ne lui avait proposé d’aide. C’était bien aux adultes d’aider les enfants en premier lieu, pas l’inverse !

En parlant d’aide, il se remémora l’échange qu’il avait eu avec ce garçon… Il avait déjà oublier son nom, mais son apparence atypique et son animal tout autant atypique étaient restés frais dans sa mémoire. Il n’aurait peut-être pas dû réagir si violement après tout, si ce gamin était un pion des Gardiens, ça devait plutôt être lui le plus à plaindre. En plus si il avait accepté de l’aider, peut-être que ça lui aurait épargné d’avoir à s’abimer les mains sur ces… de racines à la noix. L’hospitalité c’est sacré à Kanëzak, on aurait certainement accepté !

En prenant conscience de cela, Azul s’énerva.

- Crotte de laüd, arrêtez de faire vos débiles, vous êtes des adultes ! Je vais me recoucher !

Il frappa du poing sur la table et se dirigea d’un pas rageur vers son échelle, sous le regard choqué de ses parents.

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